“Quand la régulation devient répression, la démocratie recule.”
Alors que la République Démocratique du Congo continue de se proclamer État de droit et démocratie pluraliste, le paysage médiatique, lui, envoie des signaux contraires. L’émission Face à Face, dans un numéro spécial diffusé récemment, a mis en lumière les tensions croissantes entre le pouvoir et la presse, en confrontant Christian Bosembe, président du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC), aux critiques virulentes d’un secteur en quête d’indépendance.
C’est un échange tendu, presque symbolique, entre deux figures du paysage médiatique congolais : d’un côté, Christian Lusakueno, journaliste respecté, de l’autre, Christian Bosembe, patron du CSAC, perçu par certains comme le bras armé du pouvoir exécutif. Au centre du débat : la question brûlante de la liberté d’informer en RDC.
Censure ciblée, sanctions sélectives
Depuis plusieurs mois, des signaux d’alerte se multiplient. Des médias locaux se voient interdits de couverture sur des figures clés de l’opposition — l’ancien président Joseph Kabila, le PPRD ou encore des voix critiques du régime actuel. Ces interdictions, non explicites mais bien réelles, sont assorties de menaces de sanctions, de suspensions et, parfois, de retraits d’agrément.
Dans les faits, de nombreux journalistes témoignent d’une atmosphère de peur et d’autocensure. Le CSAC, censé être un arbitre impartial, est de plus en plus perçu comme un organe de contrôle politique, dictant les lignes rouges à ne pas franchir.
Médias étrangers : liberté à géométrie variable
Un paradoxe fait grincer des dents dans les rédactions locales : alors que les médias congolais sont étroitement surveillés, les plateformes de la diaspora et les chaînes émettant depuis l’étranger diffusent en toute liberté des contenus similaires — voire plus virulents.
Pourquoi cette tolérance différenciée ? Le CSAC semble impuissant face aux opérateurs basés à l’extérieur de ses frontières, créant un déséquilibre dangereux entre les journalistes locaux muselés et ceux de l’étranger, libres de critiquer sans crainte.
Bosembe à l’épreuve de la contradiction
Face aux accusations, Christian Bosembe a tenté de rassurer : toutes ses décisions seraient prises dans le strict respect de la loi. Pourtant, ses arguments peinent à convaincre. De nombreux professionnels des médias dénoncent une gestion partiale, opaque, et de plus en plus politisée.
Son mandat, entamé dans l’espoir d’une régulation moderne, est désormais entaché d’accusations de favoritisme, de décisions arbitraires et d’une soumission implicite au pouvoir politique.
Une démocratie en trompe-l’œil ?
Ce qui se joue ici dépasse largement le CSAC. C’est toute la santé démocratique de la RDC qui est en question. Une presse libre est l’un des fondements d’un État de droit. Or, en RDC, la parole publique semble se refermer. Le contrôle de l’information se recentralise. Et chaque critique devient suspecte.
Le risque est clair : à force de faire taire les voix dissidentes, le pays glisse lentement mais sûrement vers une forme de dictature médiatique soft, maquillée sous les apparats de la régulation.
Ce qu’il faut retenir
Le CSAC est accusé de dérive autoritaire et de répression ciblée ;
Les médias locaux sont plus sévèrement encadrés que ceux de la diaspora ;
La liberté de la presse en RDC est aujourd’hui plus que jamais menacée ;
L’interview de Bosembe, bien que nécessaire, n’a pas suffi à lever les doutes.
À qui profite le silence ?
Dans un pays où les institutions sont fragiles et la gouvernance encore largement personnalisée, le contrôle de l’information est un outil de pouvoir. La tentation de museler la presse, sous couvert de régulation, est une pente glissante qui mène à l’autoritarisme.
Il ne suffit pas de proclamer la démocratie pour qu’elle existe. Il faut en garantir les piliers — et la liberté d’informer en fait partie.
🖊 H. Zinu | Rédaction – Belgique
📩 Contact presse : info@belnewstv.be
🌐 Suivez toute l’actualité sur : www.belnewstv.be
📲 Facebook, Twitter, Instagram : @belnewstv