L’artiste-musicien « Le Karmapa » devient un peintre de la société congolaise. Depuis l’année passée, le chanteur a choisi d’orienter ses compositions vers les faits quotidiens sur l’environnement de la ville de Kinshasa ainsi que des 25 autres provinces du pays. Après la chanson « Honorable Député » et « Maman Yemo » qui allaient le créer des ennuis, Le Karmapa se trouve en studio pour réaliser une nouvelle chanson intitulée « Ekolo boo moko ». Celle-ci est une contribution de l’artiste pour la lutte contre les antivaleurs déclenchée par le chef de l’Etat, Félix Tshisekedi.
Il n’a pas hésité à expliquer quelques paroles contenues dans ce nouveau titre en rassurant qu’il a reçu l’encouragement du chef de l’Etat. On se rappellera que « Maman Yemo » a suscité un tiraillement entre l’artiste et les dirigeants de l’hôpital de référence de Kinshasa, ex-hôpital Maman Yemo et, la situation a fini par être réglée. La diffusion de la chanson a été autorisée à la radio, à la télévision et dans toutes les autres plateformes, cela, après quelques jours d’interdiction par la commission nationale de censure.
Le Karmapa nous parle ici de son texte aussi musclé, en faveur de la communauté Kinoise.
Belnew Tv : « Ekolo boo moko », voulez-vous remettre à la tête des congolais les idéologies du mobutisme ?
Le Karmapa : Non, je voulais plutôt rappeler des bonnes choses de l’époque. C’est-à-dire, je dénonce les antivaleurs qui ont pris le pays en otage. Pour ne parler que de Kinshasa, cette ville qui était le miroir de l’Afrique centrale, mais aujourd’hui, elle est la plus sale que l’on ne peut imaginer.
Comment ça ?
Je peux illustrer mes propos avec d’exemples : A Kinshasa lors qu’il pleut, il y a même de personnes qui se permettent d’ouvrir leurs fosses septiques pour faire échapper les matières fécales dans les eaux de pluie. Quelqu’un qui balaie chez lui, finit par jeter les immondices dans la rue ou dans le caniveau, sans crainte. Les trottoirs sont occupés par les marchands ambulants au vu et au su des autorités municipales. Faites un tour au marché central de Kinshasa, se sont de montagnes des immondices qui vous accueillent. Et gouvernés et les gouvernants y trouvent normale cette situation qui spolie l’environnement. Ça c’est du côté insalubrité.
Où vont alors les recettes quotidiennes de la vente des tickets au marché central, évaluées à de millions de francs congolais ?
Ceux qui les perçoivent sont mieux placés pour répondre à cette question. C’est pourquoi on parle des antivaleurs. Ceux qui s’occupent de la vente des tickets dans les marchés ne sont-ils pas versés dans le lot des antivaleurs ? On ne sait plus là où nous allons.
Le regard de Karmapa n’est pas encore tourné vers le tribalisme, un autre fléau qui gangrène la société congolaise ?
Un aspect aussi malheureux est celui du tribalisme. A l’époque, on a vu un Koyagiaro de l’Equateur dirigé le Katanga, Konde Vila Kikanda du Bas-Congo gouverné le Kivu, Henri Takizala du Bandundu était gouverneur de l’Equateur, Geyero Tekule ou Edouard Buludwe non originaires de la province Orientale l’ont gouverné, pour ne citer que ceux-là. Ces derniers ont laissé de bonnes impressions auprès de la population. Après plusieurs années, Konde a été élu député national au Sud-Kivu, si je ne me trompe pas. Il n’était pas originaire de là, il était du Kongo central.
Aujourd’hui, il n’y a que les originaires qui gèrent leurs provinces. Un Atu Matubuana au Kongo central sa province d’origine, non seulement lui, mais tous les gouverneurs sont chacun originaire de la province qu’il gouverne. Et, ils les gouvernent aussi mal, à part quelques exceptions. Je veux qu’on rentre à l’époque de Mobutu où le tribalisme n’était pas comme maintenant.
N’avez-vous pas peur d’être une cible de ceux que vous appelez des antivaleurs ?
Le mot antivaleur est des politiciens, il n’est pas sorti de ma bouche. Pourquoi avoir peur ! Et, peur de qui ? nous sommes tous congolais « Ekolo boo moko ». Comme je l’ai dit ci-haut, c’est ma contribution à la nation congolaise. Nous devons lutter contre les antivaleurs qui ont pris le pays en otage. Pour votre information, lors de ma rencontre avec le Chef de l’Etat, il m’a encouragé et m’a dit : « il faut continuer à dénoncer les antivaleurs ». Entant qu’artiste, je dois contribuer à la reconstruction de mon pays par la chanson. Lorsque vous allez publier cet entretien, vous contribuez aussi, dans le domaine qui vous concerne, à la reconstruction de notre beau pays qui est la RDC.
Vous avez succédé à Luambo Makiadi, le chantre de la nation qui dénonçait sans avoir peur, malgré arrestation et exil, le mal de la société congolaise ?
Oui, je suis de cette école, je compose, je chante, je danse sans m’éloigner de la rumba. J’honore la mémoire de Franco Luambo Makiadi et ce n’est pas parce qu’il est mort que l’on doit enterrer son talent, son style, ses mérites. C’était un grand et il restera toujours un modèle.
Si vous chantez une autorité, il vous jette de fleurs et pourquoi pas jeter plus de fleurs lors qu’on dénonce le mal de la société ? La rumba appartient à l’artiste Le Karmapa, un style qui lui permet à dénoncer le mal congolais.
Après « Ekolo boo moko », on peut s’attendre à quoi ?
Vous avez reçu « AVC », « Kaligula », « Maman Yemo » et bientôt « ekolo boo moko », suivi de « Kinshasa », « Kirumba » qui est un mélange de plusieurs tribus et tant autres en préparation.
Bien que la covid-19 fait sa loi à travers la planète, que dit Le Karmapa pour sa prochaine tournée européenne ?
Ma tournée européenne a été ajournée à cause de la pandémie de la covid-19, les démarches ont été renouées et elles vont bon train. Je mise plus l’Olympia de Paris. Me produire dans cette salle est la plus grande préoccupation de la tournée. C’est pourquoi, mes vœux sont de voir le promoteur de la randonnée de s’y atteler.
La musique congolaise, presqu’en chute libre devant d’autres pays du continent ?
Qui vous a dit ça ? Personnellement, je ne soutiens pas cette thèse, elle ne tient pas debout. Le monde évolue et les choses changent. Notre musique a déjà inscrit son nom en lettres d’or. Le monde entier, surtout le continent africain reconnait les lettres de noblesse de musique congolaise.
Propos recueillis par Gel BOUMBE/BelNews Tv